À la fin de la guerre, en 1945, il ne reste à la CAENNAISE que 5 navires, 3 vieux navires, antérieurs à 1930 : les GALLIUM, CIRCÉ (2), MÉDÉE, et 2 ayant moins de dix ans : les DANAÉ (3) et ÉGÉE.
Elle récupère, à la libération de Caen, aux chantiers de Blainville, un petit navire-citerne, mis sur cale pour le compte des Allemands, qu’elle transforme et arme ensuite pour assurer le ravitaillement en eau potable des troupes alliées.
En 1945, l’État qui a acheté un petit «collier», construit à Glasgow en 1944, le donne en gérance à la SNC, c’est le LIEUTENANT LANCELOT ; elle l’acquiert la même année.
En 1946, elle récupère de la même façon l’HADRUMÈTE, construit à Sunderland en 1907, il y a presque cinquante ans !
La même année lui est livré NIOBÉ (3), commandé et mis sur cale aux chantiers de Grand-Quevilly en 1940, Bombardé, incendié, il est reconstruit. L’année suivante suit DAPHNÉ (3), qui avait subi le même sort et la même reconstruction.
Le Gouvernement français afin de réparer rapidement les dommages de guerre passe d’importantes commandes de navires en France ou à l’étranger pour le compte des armateurs.
Ce sont :
le DIONÉ (2), ex. LENS, aux chantiers de Bretagne, 3.500 tonnes;
le THISBÉ (4) aux chantiers de Grangemouth (Écosse), 3.500 tonnes ;
les PHRYNÉ (2) et THÉSÉE aux chantiers canadiens de Davie Shipbuilding à Lauzon,5.088 tonnes ;
les ASTRÉE (3), BORÉE (2), HÉBÉ (3), CARONTE aux chantiers canadiens Burrard Drydocks de Vancouver, de près de 8.000 tonnes.
À ces navires, propriété de la CAENNAISE, il faut ajouter les liberty ships de l’État qui lui sont confiés en gérance : les OUISTREHAM, CAEN, LORIENT, ORLÉANS ; puis plus tard les AVRANCHES, MORTAIN, SAINTE-MÈRE L’ÉGLISE.
Tous sont des vapeurs classiques, comme on sait le faire simplement à l’époque, qui chauffent au mazout au lieu du charbon. Le tonnage des ASTRÉE (3), BORÉE (2), HÉBÉ (3), CARONTE et des liberty ships ne leur permet pas de fréquenter le port de Caen., ils sont placés sur des trafics au long cours.
À ces navires se joignent les navires de seconde main :
le NÉRÉE construit en 1915 à Bristol, 1.370 tonnes ;
le PROTÉE construit à Middleborough en 1921, 6.147 tonnes.
C’est au moment où la flotte de la SNC revient au niveau de l’avant-guerre, que des projets de développement voient le jour, que M. Gaston LAMY décède. C’est M. Georges GUILLIN, son gendre, qui l’a accompagné depuis de nombreuses années, qui lui succède.
Afin de pouvoir satisfaire les demandes des clients, accéder à certains ports (les 15 pieds 6 de Flixborough), il faut des navires plus petits que les «turbinards» ou les liberty ships, d’un tonnage équivalent aux navires qui ont disparu pendant la 2e Guerre mondiale. Pour cela la CAENNAISE fait construire :
le CHLOÉ, aux chantiers de Bretagne, 2.780 tonnes ;
les ALCÉE, ÉNÉE, PSYCHÉ, au chantier Amsterdamsche Droogdok à Amsterdam, 2.550 tonnes ;
les PROMÉTHÉE, ANTÉE, aux chantiers de Blainville à Caen, 5.890 tonnes.
Elle possède aussi, avec sa participation à la S.E.M. (Société d’Études Maritimes», des participations de 30 à 33%, qui cesseront en 1962, dans : les CARONTE, VÉNISSIEUX, LONGUEAU, DE MOULEZIN, ACHÈRES et PERRIGNY ; des vraquiers qui avaient été destinés à la S.N.C.F.
L’analyse qu’avait fait M. Gaston LAMY, dès avant 1950, sur le trafic des charbons et des minerais : « les charbons américains, sud-africains, en attendant ceux d’Australie, transportés par des gros navires, supplanteront au point de vue des coûts les charbons européens, il en sera de même pour les minerais de fer de Mauritanie », conduisent la Caennaise à vouloir et devoir diversifier ses lignes.
L’expérience acquise pendant la guerre avec la gestion de la flotte basée en Méditerranée et l’antenne de Marseille l’incitent à venir «chasser» sur les trafics d’A.F.N, en créant une ligne à partir de Caen et une à partir de La Nouvelle et Toulon, l’accès au grand port de Marseille étant encore un peu compliqué face aux autres armements qui sont solidement implantés dans ce port..
Elle affecte d’abord, au départ de Caen, un petit vapeur de 1.685 tonnes acquis en seconde main, «PHÉBÉ», qui sera vite remplacé par DAPHNÉ (3).
À partir du Midi sont mis en service de petits navires de 500 tonnes : les FORT LAMALGUE, FORT MALBOUSQUET et SAINTE ANNE. Ce dernier connaît une fin tragique ; il disparaît corps et biens au NE des Baléares. Cette disparition n’est toujours pas élucidée.
Dans cette période d’après-guerre, où il a fallu d’abord songer à reconstruire vite ce qu’on pouvait faire immédiatement naviguer, un mouvement se fait dans la Marine marchande vers les navires à moteur, les vraquiers self-trimers, aux panneaux métalliques largement ouverts, les navires à marchandises diverses, les vrais, rapides, avec de la ventilation mécanique, des faux-ponts, des cales réfrigérées.
Ce sera l’objectif de la SNC dans les années 1950.
Pour accompagner ce développement la SNC va s’appuyer sur un réseau portuaire structuré, ce sera la naissance des filiales : la SOGENA (Manutention, Consignation, Transit, Stockage), la SOFRINO (Froid), la SOMARCO. ; sociétés qui ont survécu à disparition de la SNC.